Je m’appelle Jason, je suis espion par vocation. J’ai toujours adoré me dissimuler, mener une double vie, enfiler des costumes sur mesure, cacher ma vraie personnalité sous des apparences mortellement trompeuses, et ça depuis ma plus tendre enfance. Alors quand on m’a proposé de devenir espion à la solde d’un des plus grands Ordres de Daifen, vous pensez bien que je n’ai pas hésité une seconde !
J’ai travaillé pour de nombreux seigneurs mais cela fait maintenant plusieurs centaines de lunes que je suis aux ordres de X, oui, c’est ça, appelons-le X si vous voulez bien, mes fonctions m’interdisant bien évidemment de dévoiler toute la vérité, c’est une chose que vous êtes en mesure de comprendre. Et c’est lorsque X m’a appelé dans son QG, la nuit dernière, que tout a commencé…
- Voilà ta prochaine cible Jason ! m’a-t’il dit en plaquant une image sur la table devant moi, elle s’appelle Shay, c’est une Lumineuse, elle se trouve sur Ordradhil. Tes ordres sont simples, tu t’infiltres, tu notes tout ce qui te tombe sous les yeux et tu reviens dare-dare me faire ton rapport.
J’ai examiné de près la photo : Shay est une petite brunette qui passerait assez inaperçue si elle n’avait pas ces deux yeux immenses braqués en permanence sur vous, mais ça, je ne le découvrirai que plus tard. Toujours est-il que j’ai fait mes bagages et que j’ai quitté Umodhil en pleine nuit pour gagner Ordradhil. Ah Ordradhil ! Le continent le plus âprement disputé, le plus sauvage et le plus cruel qui voit le couronnement d’un seul Ordre… Vous imaginez bien que j’étais curieux de vivre ça de l’intérieur ! Eh bien je n’ai pas été déçu : à peine débarqué sur le sol ferme, il a fallu que je sprinte pour éviter d’être pris à partie par une bande de nains hallucinés qui tapait sur tout ce qui bougeait… Leur haleine empestait le houblon, leurs yeux tournaient dans leurs orbites mais pas aussi vite que leur hache qu’ils tenaient tous à bout de bras. Ils avaient élu domicile sur la plage et taillaient en pièce tous les nouveaux venus qui avaient le malheur d’arriver là. Heureusement ma formation d’espion comprenait un volet sportif qui m’a rendu bien service ce jour-là ! Les nains, alourdis par la bière, ne tinrent pas la marée et me laissèrent m’éloigner en hurlant de rage…
Évitant de trop penser à la façon dont j’allais bien pouvoir regagner mon embarcation, je me suis dirigé vers l’ouest, là où le campement de la Lumineuse avait été vu pour la dernière fois. Tout le monde se battait ici : il fallut que j’évite des armées d’Initiés qui allaient rendre visite à leurs copains du Clan, une armée de la Waaagh en manœuvre, des Enfants perdus dans les bois et des Nains Extrémistes qui chassaient à la lueur de lucioles apprivoisées. Bref, ce ne fut pas une partie de plaisir, aussi je soupirai de soulagement lorsque j’arrivai aux portes du campement de Shay. Là, première surprise : aucun garde, aucune vigie postée sur les murailles. Brusquement inquiet, je m’avançai sur la pointe des pieds, évitant des corps allongés à même le sol. De ces formes sombres montaient des ronflements caractéristiques de fosses nasales encombrées : tout le monde roupillait sans se soucier des combats qui avaient lieu à peine à quatre cents toises de là ! Au centre du camp, un immense barbecue contenait encore les reliefs d’une grosse fête : des cadavres en verre témoignaient que cette viande qui me paraissait succulente avait largement été imbibée, ce qui expliquait sans doute le relâchement des guerriers. Grâce à la Lumière d’une superbe Cathédrale bâtie sur la place centrale, je pus visiter tout le camp et m’assurer qu’effectivement les soldats étaient tous présents mais tous endormis. Je trouvai sans mal le QG, indiqué par des pancartes peintes à la main. Sans bruit je poussai la porte et entrai à l’intérieur. Je vis une grande table recouverte de rapports d’espionnage, de pigeons express. Je m’assis dans un fauteuil et me mis à tout lire, confiant en ma mémoire (j’ai ça dans la peau !) pour retenir l’essentiel de ces informations. Soudain un léger bruit troubla l’atmosphère calme de la pièce : je me levai doucement, la main sur mon poignard, prêt à dégainer, et c’est alors que je la vis : elle était couchée dans un hamac tendu entre deux piliers de bois. Un rayon de Lumière caressait sa joue et glissait le long de ses lèvres pleines. Ses yeux étaient fermés, elle dormait, la bouche légèrement entrouverte, un nounours en peluche collé contre son cou et dépassant d’une couverture miteuse…
- Mince, me dis-je, elle est jeune !
Sans faire de bruit, je la laissai tranquille, à peine effleuré par l’idée que j’aurai pu sans mal me débarrasser d’elle et par là même d’un ennemi potentiel de mon patron… J’en avais assez vu. Il était temps de me remettre en route en espérant que les nains de la plage soient tous en train de cuver à cette heure-ci. Pourtant, en passant devant les restes de la fête, je ne pus m’empêcher de tendre la main vers la viande rôtie qui semblait n’attendre plus que moi. Je n’avais pas mangé depuis, depuis….deux lunes ? Trois ? La tentation fut trop forte, d’autant plus que la première bouchée fut exquise… J’attrapai un fond de vodka dans une bouteille jetée là et me mis à manger tout mon soul…
Un claquement se fit entendre à mes oreilles tandis qu’une brûlure sur mes cuisses me réveilla tout à fait. Je mis plus d’une minute à réaliser où j’étais ! L’idiot ! Je m’étais endormi auprès du feu éteint, la bouteille de vodka en guise d’oreiller.. Une voix me fit tourner la tête :
- Alors espion, ton rapport ? Plus vite, je n’ai pas que ça à faire !
Elle se dressait devant moi, à deux mètres à peine, mais un fouet remplaçait son nounours en peluche dans sa main gauche. Campée sur ses jambes qu’elle avait ma foi, fort jolies, elle me toisait de la tête aux pieds. Je crus discerner une lueur gourmande dans ses yeux noirs dardés sur moi, mais je me dis que c’était certainement une hallucination… Autour de nous, la vie avait repris ses droits, le camp bruissait d’activités, on se préparait pour la guerre, je ne pouvais pas m’enfuir. Autrement dit, j’étais comme un rat pris au piège.
- Suis-moi, me dit-elle…
Sans plus me regarder, elle tourna les talons et se dirigea vers le QG.. Lorsque j’entrai dans la pièce que j’avais visitée pendant la nuit, cinq officiers en armes, prêts à aller au combat, attendaient ses ordres, debout et bien droits dans leurs bottes cirées…
- Voilà, l’espion, au fait, comment t’appelles-tu ? me demanda Shay..
- Jason, madame…
- Très bien, Jason Bourde, explique la situation à ces messieurs…
Et voilà comment je suis entré au service de Dame Shay, grâce à un concours de circonstances que je ne regrette pas vraiment : la veille au soir, un espion avait été envoyé pour observer ce qui se passait aux alentours pendant que tout le reste de la garnison fêtait les vingt printemps de la demoiselle. Heureusement pour moi, cet espion n’est jamais revenu, faut dire qu’avec tous les combats qui se déroulaient cette nuit-là, c’est pas vraiment étonnant. Shay n’avait pas la mémoire des visages, et un homme comme moi connaît mille et une façons de changer d’aspect physique : je n’eus donc aucun mal à me faire passer pour l’un de ses hommes… Et maintenant, je vois bien la question qui arrive au grand galop : est-ce que je lui suis fidèle ? A votre avis ?
La seule chose qui m’énerve, c’est le nom dont elle m’a affublé : Jason Bourde !
dimanche 3 mai 2009
mercredi 22 avril 2009
L'Augure
La vieille femme attrape la main gauche de Shay qui ne peut s'empêcher de tressaillir tant le contact et l'odeur de l'Ancienne sont répugnants. Un ongle acéré parcourt sa paume offerte tandis qu'une haleine pestilentielle glisse sur sa peau.
Shay ne voulait pas venir, ne croyant absolument pas dans toutes ces choses mystérieuses et invisibles qui hantent le monde des esprits. Pourtant son espion Jason Bourde a insisté et elle a fini par accepter de mauvaise grâce de se rendre chez la voyante, appelée l'Augure par tous ses guerriers. Paraît-il que c'est la coutume sur Ordradhil, il faut aller consulter avant de se lancer dans la bataille. Il faut dire que pour l'instant, la seule bataille qui a eu lieu dans son campement a été un affrontement verbal assez sec avec l'architecte qui voulait absolument peindre la cathédrale en rose. Quelle idée ! Rien qu'en y repensant, Shay ne peut s'empêcher de sourire en revoyant la figure de l'artiste complètement dépité devant son refus de laisser s'exprimer son envie de créateur... Non, mais, a-t'on déjà vu une cathédrale peinte en rose ? Et pourquoi pas des éléphants tant qu'on y est ?
- Oh !!!!
Le cri interrompt le fil de ses pensées et la replonge dans le moment présent : elle consulte l'Augure dans une cabane sale et puante en plein milieu de sa Cité...
- Que se passe-t'il ? demande-t'elle, brusquement inquiète devant la peur qu'elle croit lire dans les yeux de la bonne femme...
- Heu...
L'Augure se tait, laisse retomber la main de Shay et ferme les yeux. Une longue plainte sourde s'échappe de sa gorge et elle se met à moduler une lamentation qui n'est pas sans rappeler le cri du coyote en rut par un soir d'été...
Shay n'en peut plus. D'un geste décidé, elle se lève, attrape la vieille par le col et la tire sèchement vers elle, lui coupant par la même occasion le sifflet et la respiration. L'autre se tait et tente en vain de respirer, ouvrant une bouche édentée comme un poisson tombé hors de son bocal... Shay la repose violemment sur le sol et la secoue :
- Dis-moi ce qui se passe où je t'attache toute nue au chêne de la place du marché...
Sentant qu'elle est prête à mettre sa menace à exécution, l'Augure se redresse et dit :
- Le malheur est sur vous, vous n'allez pas faire long feu sur ce continent, Madame, je n'y peux rien, c'est la loi de la jungle ici...
Puis, avant que Shay ait pu l'attraper de nouveau, elle fait demi-tour et disparaît dans l'obscurité nauséabonde de son taudis.
Shay hésite à la poursuivre puis hausse les épaules et sort au soleil, résignée. L'idée de fouetter son espion responsable de cette perte de temps lui redonne le moral et elle se dirige d'un pas alerte vers sa cathédrale, vérifiant du coin de l'oeil qu'elle a gardé sa couleur d'origine...
Shay ne voulait pas venir, ne croyant absolument pas dans toutes ces choses mystérieuses et invisibles qui hantent le monde des esprits. Pourtant son espion Jason Bourde a insisté et elle a fini par accepter de mauvaise grâce de se rendre chez la voyante, appelée l'Augure par tous ses guerriers. Paraît-il que c'est la coutume sur Ordradhil, il faut aller consulter avant de se lancer dans la bataille. Il faut dire que pour l'instant, la seule bataille qui a eu lieu dans son campement a été un affrontement verbal assez sec avec l'architecte qui voulait absolument peindre la cathédrale en rose. Quelle idée ! Rien qu'en y repensant, Shay ne peut s'empêcher de sourire en revoyant la figure de l'artiste complètement dépité devant son refus de laisser s'exprimer son envie de créateur... Non, mais, a-t'on déjà vu une cathédrale peinte en rose ? Et pourquoi pas des éléphants tant qu'on y est ?
- Oh !!!!
Le cri interrompt le fil de ses pensées et la replonge dans le moment présent : elle consulte l'Augure dans une cabane sale et puante en plein milieu de sa Cité...
- Que se passe-t'il ? demande-t'elle, brusquement inquiète devant la peur qu'elle croit lire dans les yeux de la bonne femme...
- Heu...
L'Augure se tait, laisse retomber la main de Shay et ferme les yeux. Une longue plainte sourde s'échappe de sa gorge et elle se met à moduler une lamentation qui n'est pas sans rappeler le cri du coyote en rut par un soir d'été...
Shay n'en peut plus. D'un geste décidé, elle se lève, attrape la vieille par le col et la tire sèchement vers elle, lui coupant par la même occasion le sifflet et la respiration. L'autre se tait et tente en vain de respirer, ouvrant une bouche édentée comme un poisson tombé hors de son bocal... Shay la repose violemment sur le sol et la secoue :
- Dis-moi ce qui se passe où je t'attache toute nue au chêne de la place du marché...
Sentant qu'elle est prête à mettre sa menace à exécution, l'Augure se redresse et dit :
- Le malheur est sur vous, vous n'allez pas faire long feu sur ce continent, Madame, je n'y peux rien, c'est la loi de la jungle ici...
Puis, avant que Shay ait pu l'attraper de nouveau, elle fait demi-tour et disparaît dans l'obscurité nauséabonde de son taudis.
Shay hésite à la poursuivre puis hausse les épaules et sort au soleil, résignée. L'idée de fouetter son espion responsable de cette perte de temps lui redonne le moral et elle se dirige d'un pas alerte vers sa cathédrale, vérifiant du coin de l'oeil qu'elle a gardé sa couleur d'origine...
mercredi 15 avril 2009
En route pour Ordradhil
Le chariot bringuebale le long du chemin qui mène vers le redoutable territoire nommé Ordradhil. Shay est confortablement installée sur des peaux d’ours vénérables et d’autres animaux poilus dont l’origine est pour elle un mystère. Sa tête ballotte au grée des cahots et ses cheveux noirs se sont échappés du lien en cuir qui normalement doit les dompter, mais peu lui importe, elle médite en silence les propos de Sombrebarbe tout en sirotant un fond de Raux-Manay-K'honty qui lui ravit les papilles…
Elle essaie d’analyser les évènements qui s’enchaînent les uns aux autres comme des perles sur un collier et se dit que finalement elle a eu beaucoup de chance de se trouver sur la route de Sombrebarbe et des Lumineux. Elle n’est pas croyante mais elle remercierait bien quelqu’un pour cette bonne fortune…
Les derniers propos échangés avec son complice la laissent rêveuse : qui sont ces mystérieux E. N. ? Va-t-elle en rencontrer sur Ordradhil ? Il lui semble que ces individus ne sont pas vraiment appréciés, mais elle préfère attendre de voir pour porter un jugement, elle se contente d’analyser ce qu’elle a entendu ici et là…
Soudain le chariot s’arrête, un brouhaha confus l’entoure et la ridelle arrière s’ouvre, laissant passer un rayon de soleil… Des cris fusent, des paladins s’interpellent, Sombrebarbe saute hors du chariot, lui tend la main et l’aide à descendre. Voilà, elle est arrivée à destination : les paysages d’Ordradhil se déploient sous ses yeux mais ce qui retient son attention, c’est un monument splendide qui attire la Lumière, la capture dans ses innombrables vitraux et la restitue en des milliers de particules multicolores qui enchantent sa vue : une immense cathédrale se dresse au milieu de son campement, si belle, si majestueuse que sa silhouette fière et redoutable inspire le respect.
Derrière elle le chariot repart, emmenant son complice vers son propre campement.
Elle essaie d’analyser les évènements qui s’enchaînent les uns aux autres comme des perles sur un collier et se dit que finalement elle a eu beaucoup de chance de se trouver sur la route de Sombrebarbe et des Lumineux. Elle n’est pas croyante mais elle remercierait bien quelqu’un pour cette bonne fortune…
Les derniers propos échangés avec son complice la laissent rêveuse : qui sont ces mystérieux E. N. ? Va-t-elle en rencontrer sur Ordradhil ? Il lui semble que ces individus ne sont pas vraiment appréciés, mais elle préfère attendre de voir pour porter un jugement, elle se contente d’analyser ce qu’elle a entendu ici et là…
Soudain le chariot s’arrête, un brouhaha confus l’entoure et la ridelle arrière s’ouvre, laissant passer un rayon de soleil… Des cris fusent, des paladins s’interpellent, Sombrebarbe saute hors du chariot, lui tend la main et l’aide à descendre. Voilà, elle est arrivée à destination : les paysages d’Ordradhil se déploient sous ses yeux mais ce qui retient son attention, c’est un monument splendide qui attire la Lumière, la capture dans ses innombrables vitraux et la restitue en des milliers de particules multicolores qui enchantent sa vue : une immense cathédrale se dresse au milieu de son campement, si belle, si majestueuse que sa silhouette fière et redoutable inspire le respect.
Derrière elle le chariot repart, emmenant son complice vers son propre campement.
jeudi 9 avril 2009
Candidate !

Beaucoup de bruit dans cette taverne : Shay pose les deux mains sur ses oreilles et regarde les consommateurs s’agiter, vociférer dans de grands mouvements de bras, ouvrir des bouches édentées pour appeler une serveuse, faire signe au patron de resservir une tournée… Les sons lui parviennent déformés, assourdis, et elle ne peut s’empêcher de rire, complètement grise : le degré d’alcool de la liqueur ambrée présente dans son verre y étant pour quelque chose…
Au départ, elle n’aurait pas dû s’arrêter dans ce lieu, pressée qu’elle était d’embarquer pour Furpaudhil. Et puis, au moment de monter sur le bateau, une envie de faire pipi irrésistible : que faire ? Pas facile pour une jeune fille de s’isoler et de s’accroupir. Un mec a juste besoin d’un poteau ou d’un mur, mais pour une nana c’est plus compliqué. Seule solution : direction la Taverne où là, moyennant consommation, on peut profiter des lieux d’aisance. Et c’est ce qu’elle a fait, un petit whisky et hop, un petit pipi. Hélas, un bon guerrier ne reste jamais sur une jambe, c’est bien connu… Alors elle a doublé le premier verre, puis elle l’a triplé, mettant cette envie de consommer inhabituelle chez elle sur le compte de la chaleur qui lui a brutalement envahi le visage. Jason Bourde, son espion attitré, déjà au boulot sur Furpaudhil, a bien essayé de l’entraîner hors de cet endroit, en vain.
Soudain le silence se fait : un personnage nouvellement venu fait un petit discours tout près du zinc :
- Je m’appelle Sombrebarbe, je fais partie de l’Ordre de la Lumière, je cherche des volontaires pour participer à Ordradhil, est-ce que ça intéresse quelqu’un ?
Shay enlève les mains de ses oreilles, histoire de savoir la raison de ce silence. Elle ne saisit que les derniers mots de la question posée… Autour d’elle, deux, puis trois mains se lèvent. Elle regarde attentivement l’annonceur et se dit qu’il a fière allure, qu’elle aimerait bien le connaître mieux : depuis qu’elle est arrivée dans ce monde, elle n’a pas encore eu le temps de se faire des amis, occupée qu’elle a été à guerroyer dans tous les sens. C’est pourquoi, lorsqu’il redemande à la cantonade s’il y a des personnes intéressées, sans savoir de quoi il retourne, elle lève une main vers le plafond en criant d’une toute petite voix :
- Moi, moi aussi, je suis intéressée…
Un grand homme, plus ou moins barbu, plus ou moins âgé, se penche vers Sombrebarbe et lui murmure quelque chose à l’oreille. Une discussion s’ensuit, ponctuée de gestes, de mimiques et de grimaces. Shay se désintéresse de tout ça, d’autant plus que son verre est de nouveau rempli, miracle qu’elle ne s’explique pas. Au bout d’un moment, Sombrebarbe et son compère fendent la foule et viennent tous les deux s’asseoir face à Shay qui a déjà oublié cette histoire et qui contemple la liqueur ambrée qu’elle fait tourner au fond de son verre, indifférente au monde qui l’entoure…
Une voix grave et puissante la tire de ses songes et soudain, face aux deux yeux pénétrants qui la dévisagent, elle sent les brumes de l’alcool s’estomper et son esprit redevenir clair et vif :
- Je m’appelle Ristournel, je suis le Grand Maître de l’Ordre de la Lumière, notre Ordre est composé de Seigneurs honnêtes et loyaux, vous sentez vous de taille ?
Shay n’hésite pas une seconde :
- Oui, je me sens de taille, mais que dois-je faire ?
- Accepter de devenir un de nos membres et défendre nos couleurs sur Ordradhil…
Soudain elle se sent petite, toute petite, elle craint de ne pas être assez forte, sa confiance en soi n’a jamais été très élevée… D’une toute petite voix elle demande :
- Et c’est dur, Ordradhil ?
Les deux hommes se regardent, se sourient d’un air complice et le grand Maître répond :
- Oh oui, c’est dur, mais nous allons y arriver !
Shay respire un grand coup puis, après quelques secondes de réflexion, dit :
- Alors c’est entendu. J’accepte. Je n’ai aucune attache ici, alors si vous voulez de moi, je suis des vôtres !
- Parfait dit Sombrebarbe, c’est entendu !
Il se tourne vers une serveuse et lui crie :
- Hop là, remettez nous ça !!
Shay se laisse gagner par une douce euphorie, essayant d’imaginer les futurs combats qui l’attendent. Mais ce qu’il va lui falloir au plus vite, c’est trouver un bon lit pour cuver tout ce qu’elle a ingurgité dans cette Taverne !
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