mardi 7 avril 2009

Furpaudhil


Cette fois, il ne se fera pas avoir : au lieu d’arriver comme un cheveu sur la soupe, à toute vitesse en braillant, il va tout doucement, le plus silencieusement possible et sans manifester la moindre liesse tapageuse. Il n’a pas envie de terminer comme son prédécesseur, ligoté au poteau qui sert habituellement de cible aux archers, en plein soleil, la peau zébrée des coups de fouet de la cheftaine… Quelle idée aussi de s’engager dans l’armée d’une bonne femme ! Dire qu’il y avait d’autres seigneurs et qu’il a fallu qu’il tombe sur celle-là ! Il n’a pas pensé un seul instant que Shay était un prénom féminin… S’il avait su… Mais bon, c’est fait alors faut bien assumer maintenant.
Il arrive en vue de la baraque, ralentit puis reprend son avancée, s’arrêtant devant la porte : il frappe trois coups timides. Il se dit qu’elle doit encore être vautrée dans son lit comme avant-hier après-midi, en train de cuver comme une barrique…
- Entrez !
Sa voix est claire, elle est réveillée !! Faut dire qu’il est quand même neuf heures passées.. Il pousse la porte tout en restant prudemment sur le seuil, le temps que ses yeux s’accoutument à l’obscurité qui règne à l’intérieur. Il finit par la distinguer. Elle est assise à son bureau, un cigare se consume dans le cendrier devant elle, l’enveloppant d’une fumée bleue odorante. Le paladin se rend compte qu’elle est coiffée et qu’elle a pris le temps d’étirer ses yeux noirs avec du khôl, une substance utilisée par les femmes pour se rendre encore plus jolies. Jolie ? Elle l’est, certes, mais d’une beauté discrète qui se cache au fond de ses prunelles et dans son sourire qu’elle a éclatant mais qui est si rare…
- Qu’est-ce que tu attends ?
Sa voix incisive et froide le ramène au moment présent. Il lui tend une feuille et dit :
- Madame, nous embarquons ce soir, c’est officiel !
Elle ne prend pas la feuille mais se lève aussitôt, un sourire éclatant sur les lèvres. En un tournemain, elle ramasse les papiers qui trainent sur sa table et les fourre dans sa sacoche, se retourne vers son lit et saisit un fouet qu’elle enroule soigneusement et qu’elle glisse dans un étui attaché à sa ceinture, enfile une longue veste qui lui arrive aux mollets et sort sans un regard derrière elle :
- Parfait, dit-elle, on y va, je suis prête et impatiente d’en découdre… Comment s’appelle l’endroit où l’on va ?
- Heu… Furpaudhil, me semble-t-il, oui, c’est ça, nous partons pour Furpaudhil…
- Très bien, les bagages sont prêts, que les scribes se mettent au boulot le plus vite possible, il me faut des troupes fraîches rapidement… Allez, c’est parti pour Furpaudhil.. Au fait, ça veut dire quoi, Furpaudhil ?
Il hésite avant de répondre :
- Ben justement, j’en sais trop rien, M’dame…
- C’est pas grave, va y’avoir de la castagne, c’est ça qui compte, allez dépêche-toi, on y va !
Et dans une grande envolée de veste, elle se hâte à grands pas vers l’embarcadère….

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Shay